Le Bang Bang Club est en fait le surnom plus ou moins assumé de 4 photojournalistes, soient Greg Marinovich, Kevin Carter, Ken Oosterbroek et Joao Silva, ayant oeuvré en zone de guerre dans les années 1990. Le terme fait référence aux balles qui fusent de partout dans ce contexte de travail. Basés en Afrique du Sud, les 4 hommes travaillant pour le journal The Star ont couvert, entre autres, la période précédant la fin de l’Aparthied, empreinte d’une violence extrême due au conflit Inkatha – ACN.
Aujourd’hui, seulement 2 membres du club sont toujours vivants : Marinovich et Silva. En effet, Oosterbroek décéda d’une balle en plein thorax alors qu’il couvrait une des nombreuses manifestations Inkatha – ACN, quelques jours avant les premières élections libres d’Afrique du Sud et Carter, qui avait de graves problèmes de drogue, s’enleva la vie peu de temps après.
Plusieurs de leurs photos se sont méritées le célèbre prix Pulitzer. En voici quelques-unes :
La première photo met en scène un homme qui fut brulé vif et achevé à l’arme blanche, au coeur d’un township d’Afrique du Sud. Cette photo sema la controverse de par sa grande violence, mais aussi en raison du fait qu’elle était la preuve importante d’un crime. Elle plongea d’ailleurs son photographe, Greg Marinovich, dans une position délicate, car les autorités désiraient l’obliger à comparaitre à titre de témoin de l’assassinat, chose qu’il refusa.
La deuxième photo a été prise pendant de la guerre civile au Soudan, alors que la famine faisait rage. On y retrouve une fillette, visiblement à bout de forces et affamée, avec à ses trousses un vautour qui attend patiemment que celle-ci s’écroule. Cette photographie fut à la base d’une énorme polémique découlant de l’inertie du photographe face à cette situation et du fait qu’il n’avait rien fait afin d’aider l’enfant, qu’il ne savait pas ce qu’elle était devenue. Plus tard, on découvrit que la protagoniste de la photo était en fait un jeune garçon. Dans les carnets laissés par Carter à sa mort, on retrouve quelques lignes à propos de cette scène :
À environ 300 mètres du centre d’Ayod, j’ai croisé une toute petite fille au bord de l’inanition qui tentait d’atteindre le centre d’alimentation. Elle était si faible qu’elle ne pouvait faire plus d’un ou deux pas à la fois, retombant régulièrement sur son derrière, cherchant désespérément à se protéger du soleil brûlant en se couvrant la tête de ses mains squelettiques. Puis elle se remettait péniblement sur ses pieds pour une nouvelle tentative, gémissant doucement de sa petite voix aiguë. Bouleversé, je me retranchai une fois de plus derrière la mécanique de mon travail, photographiant ses mouvements douloureux. Soudain la petite bascula en avant, son visage plaqué dans la poussière. Mon champ de vision étant limité à celui de mon téléobjectif, je n’ai pas tout de suite remarqué le vol des vautours qui se rapprochaient, jusqu’à ce que l’un d’eux se pose, apparaissant dans mon viseur. J’ai déclenché, puis j’ai chassé l’oiseau d’un coup de pied. Un cri montait en moi. J’avais dû parcourir 1 ou 2 kilomètres depuis le village avant de m’écrouler en larmes.
Carter s’enleva la vie dans l’année qui suivit. On raconte que le jeune garçon de la photo était déjà pris en charge par l’organisme Médecin du Monde lors de la prise de la photo, comme l’indique le petit bracelet blanc qui porte au poignet. Il aurait survécu jusqu’en 2007 avant de succomber à la maladie.
Je termine cet article en vous conseillant un excellent film relatant l’histoire de ce groupe de photographes qui n’avaient pas froid au yeux, c’est-à-dire The Bang Bang Club, mettant en vedette Ryan Philippe et les magnifiques paysages de l’Afrique du Sud. (la critique est mitigée mais, personnellement, j’ai bien aimé)